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Tabou n°6 : Se transformer c’est pour moi aussi

Comme toute culture celle de la transformation « fait silence » sur certains tabous « par crainte ou par pudeur ». Dans cette série nous nous proposons d’en découvrir sept présents dans beaucoup de projets. Pourquoi ? Parce que « rompre le silence » permet d’aborder les projets d’une manière plus efficace. Tout simplement.

La manifestation

« Il faudrait qu’ils…. » « si seulement elle… » on entend souvent ce genre de phrases dans les conversations usuelles des projets de transfo. Assez naturellement nous regardons les choses que les autres doivent changer sans voir que très souvent nous-mêmes nous avons, de manière un peu bizarre, le même chemin à faire.

Autre face de la même pièce, il est facile de constater chez les autres qu’ils prêchent une agilité ou une bienveillance qui leur fait, à eux aussi, défaut. Observer ce type de comportement incongruent nous renseigne beaucoup sur ce phénomène spécifique de la transformation, qu’il est fondamental de se regarder soi même.

Le tabou

Conduire ou accompagner une transformation demande de se transformer soi même (au moins un petit peu).

Un exemple

En 2016, une société de service financier fit appel à nous car la nouvelle équipe avait trouvé dans la DSI 40 chefs de projet qui « ne savait pas faire leur travail », bien qu’ils fussent pour la plupart plein de bonnes volontés. Le projet demanda à ce que nous les formions. Au fil du projet nous nous rendîmes compte que les chefs de projet n’étaient pas les seuls à avoir besoin d’apprendre une nouvelle façon de faire leur métier. Le DSI était dans le même cas, et nous aussi bien sûr !

Les bénéfices de regarder le tabou en face

Il existe beaucoup de raisons conscientes et inconscientes pour lesquelles nous gardons silence sur ce que nous sommes appelés à changer. Les explorer nous perdrait sans nécessairement nous aider à en sortir. Ce n’est pas l’objectif. Quel bénéfice pouvons-nous tirer à regarder ce tabou en face ? Comment devenir antifragile sur ce point.

L’avantage principal de regarder ce tabou en face consiste à dédramatiser le changement qui est nécessaire pour soi-même. Je le répète à longueur d’article sur ce blog, la transformation c’est d’abord pour soi-même. Par exemple dans la nécessité de supervision ou bien entendu dans le processus parallèle. C’est évident et ce n’est pas une grande affaire. Plus précisément c’est d’autant moins une grande affaire que nous n’y attachons pas une importance démesurée. Bien sûr en chemin nous nous rendrons compte d’une ou deux erreurs, d’un manquement ou d’une incompétence. Mais nous nous rendrons compte simplement, jamais nous ne deviendrons incompétent. Nous augmenterons peut-être la compréhension de nos limites, mais paradoxalement cette meilleure compréhension de nos limites les diminuera au lieu de les augmenter. Nos limites ont cette caractéristiques d’augmenter avec notre refus de les voir. Donc en les regardant en face, nous en limiterons les effets. N’est-ce pas proprement génial ?

Pour aller plus loin

Cette notion est au cœur de mon intérêt pour l’antifragilité dans le métier et en général.

Pour apprendre à utiliser les obstacles au profit du projet et rendre la transformation antifragile vous pouvez participer au prochain atelier « la transformation antifragile » : dates et inscriptions ici.

Accepter le sens antifragile

Dans les projets et plus généralement les organisations en transformation les dirigeants ont souvent l’occasion et le besoin d’élaborer et de présenter un « sens » à l’action. Pour cela avec mes associés nous leur proposons de structurer leur discours suivant le canevas de Simon Sinek présenté ici.

Le Sens antifragile part des observations faites lors des projets. Souvent j’ai vu ou accompagné des dirigeants qui élaboraient un sens très pertinent à leur niveau qui n’était pas compris par les niveaux sous leur responsabilité. Le cas le plus emblématique est celui d’une stratégie d’entreprise dont 75% des cas d’échec peuvent s’expliquer par une mauvaise appropriation (voir l’étude source sur le site du cabinet de conseil en stratégie AT Kearney).

Lorsque j’ai été formé au coaching, Vincent Lehnardt présentait les 3 niveaux Why, How, What verticalement. Cela avait l’inconvénient d’induire qu’on « montait » de niveau comme dans une progression à un jeu vidéo mais comportait l’énorme avantage une fois mis à côté d’une pyramide de responsabilités de montrer que les leaders (dirigeants) s’occupaient plus particulièrement de sens, les managers d’organisation et les collaborateurs de production. Bien sûr cette répartition des responsabilités n’a rien d’exclusif et un ouvrier a besoin de sens dans son travail comme un manager. En revanche cela permet bien de montrer que c’est plus de la responsabilité des dirigeants de discerner le sens collectif. Par exemple c’est leur boulot de choisir une stratégie qui permette la pérennité de l’organisation.

L’heuristique est la suivante : pour élaborer un discours de sens qui parle à toute l’organisation il faut le proposer à des petits groupes de niveaux inférieurs de l’organisation et leur demander d’aider à la formulation. Ainsi nous utilisons leurs incompréhensions comme des sources de progression.

Implicitement et sans que ce soit son intention, ce canevas fait reposer sur le dirigeant la lourde tâche de trouver les mots qui parlent à tous. L’exemple de Sinek sur Martin Luther King peut même être un peu écrasant : nous n’avons pas tous, tous les dirigeants n’ont pas ni son talent, ni son sujet ni son destin. Malheureusement cette manière d’envisager les choses conduit à chercher à éviter les erreurs à élaborer un contenu parfait avec le patron en amont.

En observant de manière répétée des dirigeants élaborer un sens pertinent puis faire face à une incompréhension au mieux polie lors de la présentation j’en suis arrivé à la conclusion qu’à force de rester à ce niveau d’abstraction les dirigeants ne se rendaient plus compte de la nature de l’information dont les autres niveaux avaient besoin. Lors des transfos j’en suis même arrivé à la conclusion que les dirigeants NE POUVAIENT PAS comprendre seuls la nature de ce qu’il fallait dire aux autres niveaux. La seule solution antifragile que j’ai trouvé consiste à demander de l’aide aux autres pour formuler le sens. Ainsi dans un projet que j’ai accompagné les dirigeants de la filiale française ont dû reprendre totalement la formulation de la vision qui avait été élaborée à New-York ; celle-ci parlait sans doute aux COMEX mondial mais à personne en France. Ensuite ils ont interprété cette vision pour la France et en ont décliné une stratégie par aller/retour successifs, assez longs, avec les niveaux suivants de management. En participant, non seulement le management s’approprie la vision et la stratégie mais en plus il en améliorer la pertinence et la formulation.

 

Règles du discours

Pour moi un réel discours de sens doit :

  1. Expliciter pour les raisons de l’action
  2. Permettre à toutes les couches de l ‘organisation, dirigeant, manager et collaborateur de trouver un sens personnel à faire cette action, d’y projeter leurs valeurs. Le sens doit résonner avec les valeurs réelles, vécues, de la culture de l’organisation
  3. Faire le lien entre pourquoi nous faisons les choses et pourquoi le client va apprécier cette manière de faire,
  4. Rester formuler simplement

Exemple

Pour moi le meilleur exemple est décrit par Southwest Airlines  dans cette vidéo. Regardez au moins les 10 premières minutes, vous comprendrez comment les employés s’approprient le sens.

https://www.youtube.com/watch?v=eGxMf88I5g4

l’antifragilité vient du fait que la formulation du sens sera améliorée par toutes les incompréhensions, les discussions, les désaccords.

How to

  1. Pour arriver à une telle formulation, rien ne remplacera la présentation et la discussion de chaque terme avec des représentants de chaque couche de la population,
  2. Cela suppose d’avoir une formulation du sens qui soit synthétique,
  3. Attention à ne pas rédiger définitivement en direct, cela peut conduire à tordre le sens pour faire plaisir aux participants, ce qu’un peu de recul peut éviter.
  4. Le plus difficile restera souvent de convaincre ceux qui sont responsables du résultat final qu’ils ne peuvent le délivrer du premier coup, qu’ils doivent donc profiter de toutes les occasions de discussion pour améliorer à la fois leur pensée et leurs formulations.
  5. On procède par aller/retour : présentation, discussions, reprise des commentaires et représentation au même groupe.

Procéder ainsi par aller/retour successifs permet bien de rendre le SENS antifragile : on profite de toutes les incompréhensions, incohérences pour améliorer la pertinence du message en postulant que le message est pertinent lorsqu’il fonctionne avec toutes les parties prenantes.

Cerise sur le gâteau : en sus d’une meilleure rédaction vous gagnerez l’appropriation par toutes les personnes participantes à la formulation comme dans une vision 5 étoiles de Doyle.

Pré-requis :

Tout le protocole se sert du Sens disponible ici et peut se voir comme une extension massive du featuring.

Le canevas antifragile par principe

Pour l’avoir pratiqué depuis une quinzaine d’années, je prétends que par définition un canevas sur lequel les participants peuvent donner leur avis est antifragile. Nous pourrions résumer l’heuristique à la formule mathématique suivante :

Baromètre + Canevas = antifragile.

L’heuristique est la suivante : pour rendre antifragile un canevas il suffit de l’utiliser en équipe et de rendre visible les problèmes.

En français, si on prend un canevas visuel et qu’on demande aux participants d’y mettre leur feeling en couleur (via le baromètrebaromètre), nous obtiendrons une image globale de la représentation des participants. Comme cette image concrétise les différentes représentations, nous allons pouvoir voir les désaccords et ainsi en tirer profit en considérant qu’il y a autant d’énergie dans une convergence parfaite que dans une divergence. Quasiment systématiquement en creusant ce qui expliquait une divergence de point de vue sur un canevas les participants aboutissent à un accord sur un diagnostic plus fin du problème posé.

 

L’antifragilité vient du fait que les problèmes étant posés sur le canevas, nous allons pouvoir en profiter en cherchant à leur donner du sens, améliorant ainsi la pertinence du diagnostic.

How to

  1. Prendre un canevas visuel de taille suffisamment grande pour pouvoir y coller des post-it
  2. Demander aux participants d’évaluer les différentes dimensions en leur donnant un crédit pour les forcer à se positionner : 4 post-it, un positif, un négatif, pour 7 dimensions par exemple
  3. Faire une image grâce au canevas
  4. Etablir un diagnostic à partir de cette image

Cerise sur le gâteau : en sus d’un meilleur diagnostic vous gagnerez l’appropriation des conclusions par toutes les personnes participantes à l’analyse.

Pré-requis :

Tout le protocole se sert du Sens ici et peut se voir comme une extension massive du featuring.

Nous avons illustré le principe ici à l’aide du canevas des 7S mais nous aurions pu prendre n’importe quel autre canevas.

Analyse du fonctionnement d’une équipe

Diagnostic de fonctionnement d’équipe

Je vais donner ici le protocole le plus efficace pour utiliser le canevas du fonctionnement d’une équipe. Il existe d’autres manières de procéder plus appropriées par exemple dans le cadre d’un projet. Pour une équipe comme généralement les gens ont besoin de parler assez longuement de leur fonctionnement, je privilégie la version longue.

Nous nous basons sur le canevas suivant décrit abondamment dans l’article Canevas fonctionnement équipe :

Protocole précis

  1. Il faut avoir au préalable, sur une autre question, fait vivre un processus de baromètre car nous allons utiliser des baromètres à deux dimensions tout au long du protocole
  1. Pour commencer nous demandons à l’équipe « Comme évaluez-vous le fonctionnement de votre équipe : son efficacité sur une note de 1 (nul) à 10 (hyper efficace) et en couleur comment vous vous sentez personnellement dans le fonctionnement.
  2. Ensuite, dimension par dimension, nous reposons au gens la même question. Ils évaluent les 6 dimensions en une seule fois, à l’aide de 6 post-it différents sur lesquels ils notent la dimension et la note (pas leur nom).
  3. Ensuite la restitution a lieu dimension par dimension
    1. Chacun colle son post-it sur un tableau approprié (voir ci-dessous),
    2. Chacun explique en quelques mots sa position, sans interruption et sans débat,
    3. Une fois que tout le monde est passé on note la synthèse des avis sur le tableau de la dimension
    4. On passe à la dimension suivante
  4. On parcourt ainsi toutes les dimensions, puis on analyse l’image globale

L’étape 1 est fondamental car il y a beaucoup d’informations, 6 dimensions, une note une couleur, il faut donc y aller par étape.

L’étape 2 sert à calibrer l’énergie que l’on va mettre sur l’exercice. Si l’équipe est à 7 jaune, c’est-à-dire qu’elle est satisfaite de son fonctionnement, ce ne sera pas la même analyse qu’un 3 orange. Dans le premier cas on améliore à la marge, dans le second il y a un problème.

L’étape 3 doit se faire en un seul coup pour éviter les influences.

L’étape 4 peut-être assez longue, pour l’animateur la réponse à l’étape 2 sert à calibrer le temps de parole. Attention à ne pas passer trop de temps à optimiser une dimension à 7 jaune.

Dans l’analyse il faut partir des dimensions où il y a le plus d’inefficacité puis d’insatisfactions en privilégiant les zones de désaccords. Puis tenter de remonter des explications en remontant les dimensions.

Prendre 1 à 3 décisions maximum pour améliorer le fonctionnement. Les équipes désirent souvent un fonctionnement idéal irréaliste, nous devons les aider à rester sur des ambitions de changement atteignables et nécessaires.

Pré-requis :

Tout le protocole se sert du baromètre

Fonctionnement équipe

La question « aidez-nous à améliorer le fonctionnement de notre équipe » revient comme un classique de l’accompagnement d’équipe. Plusieurs manières de répondre à cette question existent comme faire un diagnostic externe, la repousser comme non pertinente ou proposer à l’équipe de faire son propre diagnostic. Pour cela l’équipe a intérêt à se construire une image commune de son fonctionnement afin de pouvoir partager sur le sujet.

Pour se construire cette image j’ai élaboré au fil des interventions un canevas à 6 dimensions. Initialement il vient de la gestion de projet et plus spécialement des travaux du club de Montréal sur le sujet. Si sa théorie et ses origines vous intéressent je les décris dans l’article ici.

J’ai beaucoup tourné sur ce canevas, je suis passé de 5 à 6 à 9 dimensions pour finalement revenir à ces 6 là.

Ces dimensions concernent l’équipe dans son entier, pas uniquement ses réunions. Elles sont classées dans un ordre descendant : si j’ai un problème dans une dimension, je peux aller chercher des racines, des sources, des origines dans un des dimensions du dessus. Par exemple si une équipe expérimente un chaos complet en réunion (dimension instances), cela peut être parce qu’elle n’a pas d’objectifs clairs ou de responsabilités clairement définies.

Les 6 dimensions

Voici une description succincte des 6 dimensions qui se comprennent généralement assez rapidement.

  1. Objectifs : Les objectifs que l’équipe poursuit à court et à moyen terme. Il ne s’agit pas de la vision, des objectifs longs termes, mais bien des objectifs courts et moyen terme car d’expérience ce sont ceux-là qui souvent crée des malentendus. Pour raffiner la compréhension de cette dimension l’on peut se demander : Sont-ils clairs ? Formalisés ? Partagés par tous ? Rappelés régulièrement ? Pertinents ? Régulièrement revus ?
  2. Responsabilités : la répartition des responsabilités au sein de l’équipe et autonomie pour les exercer. En clair c’est l’exercice réel des responsabilités par chacun, à la fois dans la définition et aussi dans la pratique. L’autonomie pour les exercer fonctionne dans les deux sens : souvent les membres d’une équipe se plaignent du manque d’autonomie qu’on leur laisse, mais souvent aussi les patrons se plaignent du manque d’autonomie prise par leurs équipes. Et parfois certaines équipes manquent de cadre, vivent une trop grande autonomie. Pour raffiner la compréhension de cette dimension l’on peut se demander La répartition des responsabilités entre nous est-elle claire, assumé et cohérente ? L’autonomie, la marge de manœuvre dont chacun dispose est-elle ajustée à ses responsabilités ?
  3. Instances : ce sont les différents formats de réunions qui rassemblent tout ou partie de l’équipe. Cela comprend le format (durée), la fréquence, les objectifs et la composition (membres) des réunions. Pour raffinier l’on peut se demander si les instances Sont adaptés ? Suivis ? Cohérents ? Parfois les équipes ont trop d’instances, d’autres fois elles en manquent alors certaines réunions servent à plusieurs choses. Les membres ne savent alors plus sur quel objectif se caler. Parfois les réunions s’éternisent, sont trop longues, d’autres fois, surtout pour des réunions stratégiques, l’on manque toujours de temps.
  4. Méthodes : cette dimension prête souvent à confusion, il s’agit de la manière dont nous abordons un sujet, une question, un problème, une décision. C’est le pur processus au sens de Lehnardt (voir ici). Pour mieux cerner la dimension il est très utile de se demander : Existe-t-il une ou des méthodes pour traiter des différents sujets ? Sont-elles implicites ou explicites ? Sont-elles suivies ? La plupart des équipes que je rencontre appliquent des méthodes de travail implicitement et donc parfois les méthodes utilisées ne sont pas adaptées au sujet. D’autres fois tout le monde n’a pas compris ce que l’on était en train de faire. D’autres fois enfin le patron propose des méthodes qu’il ne respecte pas lui-même, invalidant ainsi toute discipline.
  5. Climat: Idem, cette dimension prête souvent à confusion. Il s’agit du climat relationnel des échanges. Ce climat peut varier d’autant que chaque culture d’entreprise, chaque équipe, chaque personne peut avoir des préférences différentes de climat relationnel. Pour bien évaluer le climat il est fondamental de se poser les questions suivantes : le climat relationnel est-il suffisamment bon pour que les échanges soient productifs ? En particulier est-il possible de parler vrai lorsqu’il faut aborder un problème ? Ce parler vrai nécessite-t-il un groupe restreint ? j’insiste beaucoup sur le parler vrai, cher au CEE, car il apparaît fondamental dans la performance d’une équipe bien plus que le climat de confiance ou de bienveillance. L’équipe la plus performante que j’ai connu était relationnellement très dure à vivre, mais tout ce qui était important à la réussite du business se disait.
  6. Livrables : cette dimension est très simple. Il s’agit de Ce que les réunions produisent, que ce soit des décisions, des plans d’actions, de l’échange, de l’alignement ou rien. Pour la santé de l’équipe à long terme il faut que les réunions servent à quelque chose. L’on peut donc se poser des questions du type : Nos réunions sont-elles productives ? En termes de décisions ? D’échanges ? Existe-t-il des comptes-rendus ? Sont-ils utilisés ? Lorsque les livrables pêchent très très souvent la cause vient de plus « haut » dans la liste.

Attention : un comité de direction est souvent attendu pour être un lieu de décision alors que les décisions appartiennent par la voie légale au seul dirigeant. Parfois ce sont des lieux d’informations, d’enrichissement, de débats pour instruction. Les livrables attendus ne sont pas des évidences.

Les deux premières dimensions sont de l’ordre du « sens », les deux suivantes du « comment » et les deux dernières du « quoi ».

Ce canevas se prête à plusieurs protocoles de discussions collectives.

Baromètre à deux dimensions

Un des outils d’alignement les plus utiles que je connaisse s’appelle le baromètre à 2 dimensions. Pour l’utiliser il faut s’être bien frotté au baromètre « simple ». C’est une règle absolue de faire faire à l’équipe un baromètre simple avant de lui faire faire un baromètre à 2 dimensions, sinon la confusion régnera.

Il faut poser une seule question à deux dimensions, une dimension « tête » (voir les 3 centres) qui fait réfléchir et qui sera évaluée par une note de 1 à 10, et une dimension plus intuitive qui sera évaluée par une couleur. L’objectif poursuivi consiste à aider les gens à distinguer ce qu’ils pensent de ce qu’ils sentent. Pour cela il est fondamental que ce soit une même question à deux dimensions, et pas une question par dimension, sinon nous perdrons tout pouvoir déconfusionnant.

– Par exemple je peux être d’accord dans ma tête avec une décision mais ne pas avoir envie de l’appliquer. Donc je vais m’opposer à la décision, mais mon patron ne saura pas pourquoi, il pensera généralement que je suis contre. Distinguer ces deux dimensions aidera à avoir la conversation résolutoire.
– Dans le sens inverse je peux choisir (couleur) d’appliquer une décision à laquelle je ne crois pas (disons 2/10). Bizarrement alors la mise en œuvre sera lente, voire toujours reportée.

Ce qu’il est très important de comprendre, c’est que bien souvent une personne ne sait pas ce qui coince quand elle coince. Elle se pose rarement la question de savoir si c’est sa tête ou ses tripes. Donc en lui posant la question je vais l’aider à s’aligner avec elle-même. Puis lorsque la conversation aura lieue avec tout le groupe, chacun pouvant partager sa représentation, le groupe pourra s’aligner sur ce qui est accord et ce qui est réellement désaccord.

L’heuristique est la suivante : pour tenir une discussion d’alignement sur un sujet de désaccord, faire un baromètre à deux dimensions. Cela aidera les personnes comme le groupe à s’aligner.

Protocole

  1. Faire faire un baromètre simple sur une question connexe
  2. Expliquer le principe des deux dimensions
  3. Expliciter la question
  4. Faire écrire aux participants leur note sur un post-it de couleur de leur feeling
  5. Une fois que tout le monde a écrit, chacun vient coller en commentant ou non au choix de l’animateur, son évaluation. Pas de commentaires ni de débat, uniquement des questions de clarification
  6. Quand tout le monde est passé expliciter les règles de l’analyse
  7. Initier l’analyse par le groupe puis la compléter par l’animateur

Exemple

Par exemple, comme sur la photo ci-dessus, je pose la question « Comment évaluez-vous notre climat de coopération : son efficacité sur une échelle de 1 à 10 et votre feeling en couleur » ?

– Chacun pourra ainsi se déterminer, je peux être orange car les échanges sont rugueux, mais on est efficace donc je mets 9. Ce serait le cas dans une équipe où les gens doivent coopérer à partir de positions antinomiques comme la production et les commerciaux. A l’inverse je suis vert, c’est OK pour moi, mais on n’arrive à rien parce qu’on évite soigneusement les sujets qui fâchent
– L’équipe en se positionnant donnera une image de son alignement autour de la question. Sur la photo nous voyons qu’il y a deux groupes à l’évaluation différente. En discutant l’équipe pourra mieux comprendre les besoins de chacun et quoi faire pour s’améliorer, sans jamais avoir besoin de passer par une phase trop « personnelle ».

L’antifragilité vient du fait que en mettant en évidences les problèmes au bon niveau nous pourrons plus facilement trouver une solution. L’heuristique aide à passer d’une vision personnalisée à une vision plus objective, donc résolutoire.

Interprétation

  1. Pour interpréter les deux dimensions il faut éviter soigneusement de vouloir que les gens soient d’accord, mais au contraire bien chercher à comprendre leurs points de vue
  2. Pour analyser un baromètre on cherche à comprendre l’énergie du groupe. Celle-ci se mesure de trois manières :
    1. La disposition des post-it : est-elle étalée, concentrée ? Existe-t-il des points d’accumulation ?
    2. La convergence des expressions montre une énergie cohésive, qui si elle n’est pas feinte constitue une force puissance, que ce soit en positif ou en négatif
    3. La divergence des expressions demande généralement à être approfondie car elle est souvent le signe d’une tension entre deux pôles, deux manières de voir, souvent toutes deux vraies (chasse aux bonnes raisons).

 

Pré-requis :

Tout le protocole s’appuie sur le baromètre