Animer un baromètre : intention ou respect du protocole ?

Au fil du temps de nombreuses manières d’animer un baromètre se sont développées. Certains s’orientent vers l’expression. Ils choisissent alors par exemple de faire parler les « rouges » en premier. D’autres qui visent la rapidité font donner la couleur puis parler, alors que le protocole de départ demande de faire parler chacun son tour sur sa couleur. D’autres encore permettent aux gens de rester assis alors que le protocole initial demande que chacun se lève.

Comme le baromètre est une heuristique, c’est-à-dire une règle pratique qu’on ne peut pas expliquer, chacun est libre de l’animer comme il l’entend…. Cependant dans cette heuristique chaque détail répond à une intention et généralement à une expérience passée. Pour que chacun puisse choisir en connaissance de cause voici quelques explications complémentaires et discutables concernant ma pratique :

Je ne le répéterais jamais assez : l’essence du baromètre réside dans la discipline avec laquelle on s’écoute. Que ce soit le silence, les questions, la lecture des post-it où l’interprétation tout conduit à ce que l’on écoute réellement ce qui est dit. Tout débat coupera l’énergie d’ouverture qui pousse à  parler. Toute coupure enfouira les risques.
  • Qui parle en premier  ? Je préfère laisser les gens parler librement, car je vise à aider les gens à exprimer ce qu’ils ont envie d’exprimer. Je ne pousse pas les gens à mettre des rouges. Je ne vise aucune prise de conscience, aucune régulation. De plus j’ai observé que pour aider les personnes à parler ouvertement il était contre-productif d’induire quoi que ce soit. Demander à commencer par les rouges cela induit généralement que c’est important d’être rouge. Cela peut conduire par exemple à ce que les personnes utilisent le « rouge » pour prendre le contrôle du groupe alors que le « rouge », une émotion forte, est juste une information.
  • Donner sa couleur puis parler ? Lorsque la taille du groupe le permet, je préfère faire parler les personnes sur leur couleur directement quand elle colle le post-it. Faire le tour des couleurs au début puis parler, cela permet à chacun de situer où est le groupe (plutôt rouge, plutôt vert…) et donc pour les participants peu expérimentés, ce qui est généralement le cas, cela induira une version différente de l’explication. C’est en revanche préférable dans les grands groupes car dans ces cas là tout le monde ne parlera pas, donc souvent les bavards parleront pour tous et ils ont alors besoin d’avoir une image globale. Cette manière de pratiquer crée moins d’ouverture.
  • Se lever ou rester assis ? Je n’aime pas faire parler les gens assis. Lorsqu’elles se lèvent, les personnes prennent la responsabilité de leurs actes. De plus en me levant, en parlant devant tous, je prends ma place, je suis donc important, il y a un effet cathartique lorsque j’ai quelque chose d’important à dire. Parfois je dirais moins qu’en restant assis, caché, mais ce qui compte ce n’est pas que je dise tout ce que je pense, c’est que je dise ce qui est important et que je sois considéré pour cela. C’est plus #skininthegame de se lever. C’est tout.
  • Comment conclure ? L’idéal une fois que chacun a parler c’est de créer une carte avec les post-it, pour que nous ayons une image mentale commune du processus. Lorsque nous avons une seule dimension, une bonne manière consiste à poser la question « Quels enseignements nous en tirons? » et à écrire la réponse sur le même paper board où sont collés les post-it. Comme je l’évoque dans l’heuristique du même nom, le fait qu’une image commune se crée au fur et à mesure de la discussion est très important pour aider chacun à faire évoluer son avis.

En pratique un baromètre aide à la prise de conscience de la même manière (profondément) qu’une séance de psychothérapie. C’est un bénéfice par surcroit, que j’ai visé un moment. Avec le temps je me rends compte qu’il est contreproductif de chercher cette prise de conscience. Elle viendra si elle veut : autant la laisser émerger ! D’une manière plus large je me suis rendu compte qu’il était préférable d’écouter sans intention pour discerner dans ce que les gens disent le sens de ce qui se passe. Le baromètre est né pour détecter des choses cachés, c’est encore là que je trouve qu’il est le plus efficace.